Les aboiteaux Tiré de Dièreville, Relation du voyage du Port Royal de l'Acadie ou de la Nouvelle France, Rouen, Jean-Baptiste Besongne, 1708, p. 76-78, réédité dans John Clarence Webster, (s. la dir. de), The Publications of the Champlain Society. Relation of the Voyage to Port Royal in Acadia or New France, Toronto, Champlain Society, 1933, p. 258. Il en coûte beaucoup pour accommoder les terres qu'on veut cultiver, celles qu'ils apellent Hautes, & qu'il faut défricher dans les Bois ne sont pas bonnes, le grain n'y leve pas bien, & quelque peine que l'on prenne pour le faire venir par des Engrais dont on a trés-peu, on n'y recüeille presque rien, & on est quelquefois contraint de les abandonner. Il faut pour avoir des Bleds dessecher les Marais que la Mer en pleine marée inonde de ses eaux, & qu'ils apellent les Terres Basses ; celles-là sont assez bonnes, mais quel travail ne faut-il pas faire pour les mettre en état d'etre cultivées ? On n'arrête pas le cours de la Mer aisément ; cependant les Acadiens en viennent à bout par de puissantes Digues qu'ils apellent des Aboteaux, & voicy comment ils font ; ils plantent cinq ou six rangs de gros arbres tous entiers aux endroits par où la Mer entre dans les Marais, & entre chaque rang ils couchent d'autres arbres de long les uns sur les autres, & garnissent tous les vuides si bien avec de la terre glaise bien battuë, que l'eau n'y sçauroit plus passer. Ils ajustent au milieu de ces Ouvrages un Esseau de maniere qu'il permet à la marée basse, à l'eau des Marais de s'écouler par son impulsion, & défend à celle de la Mer d'y entrer. Un travail de cette nature qu'on ne fait qu'en certains temps que la Mer ne monte pas si haut, coûte beaucoup à faire, & demande bien des journées ; mais la moisson abondante qu'on en retire dés la seconde année, après que l'eau du Ciel a lavé ces terres, dédommage des frais qu'on a faits. Comme elles apartiennent à pluisieurs, ils y travaillent de concert: Si ce n'étoit qu'à un Particulier, il faudroit qu'il payât les autres, ou bien que dans d'autres travaux, il leur donnât autant de journées qu'on en auroit employé pour luy, & c'est comment ils s'accommodent ordinairement entre eux. |