Un grand trotteux Tiré de Réal Girard, « Charles Lirette Jr, le grand trappeur nord-américain », Annette Saint-Pierre, (s. la dir. de), La langue, la culture et la société des francophones de l'Ouest. Les actes du quatrième colloque du Centre d'études franco-canadiennes de l'Ouest [...], Saint-Boniface, CEFCO, 1985, p.164-167. Voici donc l'histoire sommaire de Charles Lirette Jr. Elle commence le 6 juin 1875, dans une ferme du Petit Saguenay, de la paroisse de St-Raymond, dans le comté de Portneuf, au nord de la ville de Québec, au pied des Laurentides. Il est baptisé du même nom que son père, car il est l'aîné de la famille. Charles père, originaire de la paroisse St-Ambroise de Lorette, est âgé de 30 ans. Il est venu s'établir dans une petite ferme de St-Raymond avec sa famille vers les années 1864, et c'est là qu'il épousa Élizabeth Moisan, 17 ans, issue d'une famille pionnière de St-Raymond. Quand il a 6 ans, Charles Jr quitte St-Raymond pour Ishpeming, Michigan, avec ses parents, ses 2 sœurs, Élizabeth et Angélina, et un frère, Raymond. Son père s'adonne à la trappe et à la pêche. Ils resteront là jusqu'en 1893, avec des retours temporaires à St-Raymond, entre 1885 et 1887. Ils vivront aussi à Republic et à North Hills. Six enfants s'ajoutent à la famille : Théophile, Henri, Alfred, Marie-Anne, Clairina et Adélard. À l'âge de 18 ans, Charles Jr se retrouve avec ses parents, ses 5 frères et ses 4 sœurs, à Lowell, près de Boston, dans le Massachusetts. Son père est propriétaire d'un immeuble locatif et lui-même est commis dans une boucherie. Ils font partie de la paroisse canadienne-française de St-Jean-Baptiste. Deux frères et deux surs viennent s'ajouter à la famille : Léandre, Rosanna, Arthur et Eva. À 21 ans, Charles Jr retourne à son village natal pour épouser une jeune fille du rang St-Léonard, Angélina Cantin. Le jeune couple revient s'installer à Lowell et en 1899, ils ont déjà une petite famille de trois enfants : Clairina, Alfred et Cora. À l'âge de 25 ans, Charles Jr quitte Lowell avec sa femme et ses enfants pour s'établir à Eveleth, dans le Minnesota. Pendant 11 ans, il sera bûcheron. Angélina donnera naissance à sept enfants, dont quatre resteront en vie : Marie-Anne, Arthur, Léandre et Béatrice. À 36 ans, Charles Jr quitte le Minnesota avec sa famille et des amis canadiens-français, messieurs Levesque et Francoeur, pour aller s'établir sur un « homestead » dans la région du nord-est de l'Alberta. Il est encouragé par son père qui y faisait la chasse et la trappe depuis quelques hivers. C'est une région où plusieurs nouvelles paroisses canadiennes-françaises, dont Bonnyville, sont fondées. Deux enfants, Élizabeth et Adélard, s'ajoutent à la famille, alors que Cora et Marie-Anne quittent le foyer pour la vie religieuse chez les Surs de St-Joseph de Californie. En plus de défricher sa terre, Charles s'adonne à la chasse et à la trappe, surtout l'hiver avec son père. À l'âge de 41 ans, Charles vend son « homestead » de Rat Lake pour s'acheter un magasin dans le petit village de Bonnyville, afin d'être plus près de l'école pour les enfants. Deux de ses frères, Jos-Henri et Arthur viennent le rejoindre pour l'aider dans le commerce de la fourrure. Jos-Henri fait aussi de l'enseignement. Clairina, l'aînée de la famille épouse Théodore Blais de Bonnyville en 1919, après être retournée travailler quelques années à Boston. À 45 ans, Charles Jr vend son commerce de Bonnyville pour monter faire la trappe à Fort Résolution, dans les Territoires du Nord-Ouest. Il monte d'abord avec ses garçons Arthur et Léandre, puis finalement y emmène toute sa famille. Son frère Jos-Henri, vient les rejoindre avec sa jeune épouse, Alphonsine Lefebvre de Cold Lake. Pendant qu'il s'occupe du poste de traite de fourrure, Charles Jr est aussi trappeur. Leur frère Arthur retourne aux États-Unis, pour devenir comptable chez les Surs de St-Joseph de Californie. À 50 ans, Charles quitte Fort Résolution et déménage, avec sa famille, à Eureka, en Californie. Son frère Jos-Henri retourne s'acheter un magasin à Bonnyville. Mais quelques années plus tard, Charles revient au Canada avec sa famille et travaille pendant un certain temps au magasin avec son frère. Ses garçons Arthur et Léandre épousent des filles de l'endroit et prennent à leur tour des « homesteads ». À 57 ans, Charles s'achète un quart de section au nord de Bonnyville mais il s'adonne surtout à la chasse et à la trappe. Élizabeth, Béatrice et Adélard étant aussi mariés, Charles et Angélina n'ont plus qu'Alfred avec eux, car il est handicapé. Charles fait de fréquents voyages aux États-Unis pour visiter sa famille. À 63 ans, Charles Jr est toujours actif ; s'il n'est pas en train de trapper ou de chasser dans le Nord, chez son fils Léandre qui habite à Fort Résolution, il trappe pour les fermiers de Bonnyville. Quand il a suffisamment d'argent, il voyage dans l'Est du pays ou aux États-Unis. À 69 ans, Charles Jr amène sa femme Angélina revoir leur village natal de St-Raymond. Ce sera le dernier voyage d'Angélina qui meurt l'année suivante. À 74 ans, Charles Jr accompagne Mgr Trocellier, évêque du vicariat du Mackenzie, qui visite toutes les missions oblates le long du grand fleuve, de Fort Résolution jusqu'à Tuktuyaktuk, dans l'Arctique. En 1954, il perd sa fille aînée, Clairina. À 83 ans, on retrouve encore Charles Jr en promenade au Saguenay - Lac St-Jean, toujours à la recherche de quelque parenté, soit du côté des Lirette, des Cantin ou des Moisan. À 86 ans, Charles Jr chasse et trappe encore pour les fermiers autour de Bonnyville, ou pour son propre plaisir. Et le récit de vie se termine en 1963, à l'Hôpital St-Louis de Bonnyville, avec la mort de Charles Lirette Jr, âgé de 88 ans. Ce fut la seule fois qu'il a été hospitalisé. |