Québec

1810
Naissance du commerce du bois et de l'industrie forestière

À partir de 1806, le blocus continental de Napoléon, qui prive l'Angleterre de ses traditionnels fournisseurs de bois de la Baltique, oblige Londres à se ravitailler au Canada. L’Angleterre instaure un tarif préférentiel qui favorise la vente du bois colonial sur ses marchés. Dès 1810, le bois représente les trois quarts de la valeur de tous les produits exportés du Canada.

Dans les débuts de cette nouvelle activité économique, seulement quelques habitants isolés voyaient dans la coupe des arbres situés sur leurs terres la possibilité d'augmenter leurs revenus. Mais la demande croît, le secteur se développe rapidement, et de plus en plus d’hommes partent passer l’hiver dans des camps pour bûcher. Parallèlement se développe un marché local pour la nourriture dont ces bûcherons ont besoin lorsqu’ils s’éloignent pour de longs mois. Il se crée de plus en plus d’emplois dans cette industrie, notamment dans les scieries.

Ce système agroforestier s’étend progressivement à toutes les régions du Québec. Au milieu du 19e siècle, le marché américain du bois d’œuvre, utilisé pour la construction résidentielle, connaît une forte expansion. Cinquante ans plus tard, l'industrie de la fibre de bois et de la pâte à papier créera beaucoup d’emplois permanents dans le secteur forestier.

Les circonstances et conditions de vie particulières des bûcherons – dur labeur, risques d’accident, inquiétude financière, indépendance d'esprit mais dépendance mutuelle pour ce qui est de la sécurité par exemple, promiscuité, cohésion sociale –, crée chez eux une forte identité qui se manifeste par une culture de la masculinité. Cette culture se traduit par un langage blasphématoire, la consommation abusive d'alcool et une tradition orale unique en son genre. Elle se caractérise aussi par la rudesse des manières et parfois même la violence – les affrontements physiques, en effet, ne sont pas rares, surtout à la fin des hivers longs et rudes, lorsque la tension se relâche après des mois de vie dangereuse et monotone.

Ce mode de vie disparaît peu à peu après la Deuxième Guerre mondiale, à une époque où les scies mécaniques et les routes forestières bouleversent profondément et durablement l’industrie forestière.