Histoire des écoles primaires et secondaires, suite Le secondaire français (1848-1969) Au palier secondaire, cependant, l'enseignement en français a été, jusqu'en 1969, une affaire privée. Privée de fonds, surtout. Ce sont les communautés religieuses qui, pendant plus d'un siècle, ont maintenu, sans le secours financier du gouvernement, un enseignement en français au niveau secondaire. Elles ont dispensé ce service, français ou bilingue, dans des écoles secondaires catholiques ou dans le cadre de cours classiques. Dans ces institutions, les programmes se donnent partiellement ou entièrement en français. Par leur prolongement jusqu'au baccalauréat, les collèges classiques offrent non seulement le programme « secondaire » (au Québec, le terme « secondaire » s'applique généralement à tout l'enseignement qui précède le baccalauréat) mais aussi le premier cycle du niveau « supérieur » (c'est-à-dire le niveau « collégial » du système américain). Ces institutions sont toutes confessionnelles parce que seules les communautés religieuses possèdent les effectifs et les moyens financiers suffisants pour supporter des institutions privées que les seuls frais de scolarité n'auraient jamais permis de maintenir. En Ontario, l'alliance entre l'État et l'Église implique d'abord les parties protestantes de la communauté chrétienne. Le contrôle du clergé sur l'enseignement, évidemment souhaité par les divers clergés, s'appliquait rarement au primaire et au secondaire, sauf en Ontario français. Cette situation arrangeait peut-être le clergé catholique, mais l'alternative (un système publique et anglophone) n'aurait jamais pu satisfaire la population franco-ontarienne. L'enseignement secondaire en français commença à Ottawa dans la deuxième moitié du XIXe siècle, plutôt modestement. Les soeurs Grises ouvrirent en 1845 la première école dont émergera avec le temps le Couvent Notre-Dame du Sacré-Coeur (Couvent de la rue Rideau) ; puis les oblats ouvrirent en 1848 le Collège Saint-Joseph de Bytown, appelé bientôt à devenir l'Université d'Ottawa (1866). D'autres institutions verront le jour : le Couvent Notre-Dame (1868), ouvert par la Congrégation de Notre-Dame, le Juniorat du Sacré-Coeur (1895) ouvert par les oblats, enfin l'Académie De-La-Salle (1898), ouverte par les frères des Écoles chrétiennes. La présence du gouvernement fédéral, l'existence de l'Université d'Ottawa, l'activité gravitant autour de l'évêché, la communauté des soeurs Grises et l'animation des oblats, tous ces facteurs expliquent la place que la région d'Ottawa joue dans l'évolution de l'Ontario français. Dans la première moitié du XXe siècle, une quinzaine d'écoles secondaires privées ouvriront leurs portes. On les retrouve dans toutes les régions à forte concentration de Franco-Ontariens. Dans le Nord, nouvelle région de colonisation ouverte à la fin du siècle dernier, on trouve plusieurs établissements secondaires : le Pensionnat Notre-Dame-de-Lourdes, ouvert à Sturgeon-Falls en 1904 par les Filles de la Sagesse, l'Académie Sainte-Marie, créée en 1910 par les soeurs de l'Assomption-de-la-Vierge-Marie à Haileybury, le Collège du Sacré-Coeur, un collège classique que les jésuites ouvrent à Sudbury en 1913. On trouvera plus tard l'école Saint-Joseph (1929-1965) que les Filles de la Sagesse tiennent à Blind-River. Dans le Sud, le collège de l'Assomption, fondé en 1857, devint rapidement une institution de langue anglaise. Il faudra ensuite attendre soixante-dix ans l'ouverture de l'Académie Sainte-Marie de Windsor (1928) fondée par les soeurs des Saints-Noms-de-Jésus-et-de-Marie. Plus tard, les ursulines ouvriront à Tecumseh l'école Sainte-Anne (1947). Ces deux institutions eurent d'abord un enseignement bilingue avant de devenir des institutions anglophones. En 1934, les soeurs des Saints-Noms ouvriront le Collège des Saints-Noms. Il tiendra d'abord ses classes à l'Académie Sainte-Marie. Affilié dès le départ au Collège de l'Assomption, le collège finira par se fusionner au Collège de l'Assomption qui deviendra ainsi mixte. Entre 1919 et 1953, le Collège de l'Assomption est lui-même un affilié de l'Université Western. Le plus grand nombre d'écoles secondaires de langue française se forme dans l'est à Ottawa, les Filles de la Sagesse ouvrent le pensionnat Notre-Dame-de-Lourdes en 1909, les soeurs du Sacré-Coeur ouvrent en 1910 le Pensionnat-externat du Sacré-Coeur, le clergé diocésain ouvre en 1925 le Petit Séminaire d'Ottawa, les soeurs Grises ouvrent à Ottawa, en 1918, l'école secondaire Notre-Dame-du-Rosaire et, en 1929, l'école secondaire Saint-Conrad ; à Pembroke, elles ouvrent en 1938 l'Académie Sainte-Croix. Il existera aussi des écoles secondaires à Bourget (fondées par les soeurs Grises en 1946) et à Cornwall (où les Clercs de Saint-Viateur établissent un collège classique en 1950, en remplacement du collège Blaise-Pascal, ouvert en 1949 et fermé en 1950). À la fin de la période des écoles secondaires privées, c'est-à-dire entre 1950 et 1969, plus de trente autres écoles secondaires privées de langue française verront le jour. Ainsi, le réseau secondaire de langue française (dont l'enseignement est souvent bilingue) s'est établi en marge du système public ontarien. ll constitue le seul prolongement des écoles « bilingues » publiques (séparées) restaurées par le gouvernement en 1927. Tiré de Gaétan Gervais, « L'enseignement supérieur en Ontario français (1848-1965) », Revue du Nouvel-Ontario, n° 7, 1985, p. 16-18.
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