Le fait français en Ontario, suite

2. Les Ontariens de langue maternelle française

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On sait que par le passé (en particulier du milieu du XIXe au début du XXe siècle) l'immigration en Ontario de francophones en provenance d'autres provinces canadiennes a été considérable. Les données fournies par Bernard montrent que durant les dernières décennies cette immigration s'est poursuivie. De 1971 à 1986, pas moins de 98 236 Canadiens de langue maternelle française sont venus des autres provinces s'installer en Ontario. Ces données s'accordent aux statistiques du ministère de la Citoyenneté de l'Ontario qui révèlent qu'en 1986, les Ontariens de langue maternelle française n'incluaient pas moins de 132 600 individus (31,3 pour cent) nés dans une province autre que l'Ontario. Cependant, cette immigration provient pour l'essentiel de la province de Québec (en 1986, la grande majorité des Ontariens de langue maternelle française nés dans une autre province étaient originaires du Québec). Par ailleurs, les études historiques indiquent que la prédominance des Québécois est un fait récurrent de l'histoire de l'implantation francophone en Ontario (même si dans certaines localités, à certaines périodes, des contingents non négligeables d'Acadiens sont venus s'installer).

On peut donc conclure que le français parlé par la grande majorité des Ontariens de langue maternelle française est génétiquement relié au français québécois et donc qu'à un niveau d'analyse général, il est dialectalement « homogène ». Il faut néanmoins garder à l'esprit le fait que l'ensemble des Ontariens de langue maternelle française inclut un sous-ensemble d'individus qui ne sont pas nés au Canada, et donc qui, même s'ils sont des locuteurs natifs du français, parlent cette langue sous une forme qui peut différer considérablement du français parlé par les Franco-Ontariens nés au Québec ou de souche québécoise. Les statistiques calculées par le ministère de la Citoyenneté de l'Ontario révèlent que ce sous-groupe est de taille modeste. En 1986, il n'incluait que 15 929 individus, soit 3 pour cent de l'ensemble des Ontariens ayant déclaré avoir le français comme langue maternelle. On sait que ces individus sont surtout présents à Toronto et à Ottawa. Cela dit, il est significatif que Maxwell, dans son étude sur la « communauté » francophone de Toronto, ait constaté à partir des données du recensement de 1961, que les francophones nés à l'extérieur du Canada étaient loin de former un groupe majoritaire (5,8 pour cent de l'ensemble des Franco-Torontois). Il est vrai que les choses peuvent avoir changé depuis.

(La suite se trouve dans le document suivant.)

Tiré de Raymond Mougeon, «  Perspective sociolinguistique sur le comportement langagier de la communauté franco-ontarienne  », Jacques Cotnam, Yves Frenette et Agnès Whitfield, (sous la dir.), La francophonie ontarienne. Bilan et perspectives de recherche, Ottawa, Le Nordir, 1995, p. 221-222.

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